Montréal : un « étonnant » urbanisme

Ce qui frappe en déambulant dans les rues de Montréal, c’est cette impression de liberté. Tout y semble possible !

Edifices anciens et contemporains se côtoient sans limites.

Ici, une église anglicane au toit de métal rouge s’affiche à côté d’un immeuble de verre abritant une université.

Ailleurs, des grattes ciel imposent leur verticalité tandis que, blotties à leurs pieds, des maisons en bande aux escaliers d’accès raides expriment leur horizontalité.

Aucune règle ne semble régir l’urbanisme de la ville.

Ville de contraste, l’île de Montréal est un exemple de cohabitation architecturale qui semble s’être constituée au gré des besoins (logements, commerces, industries, lieux de culte…) et au gré des emprises libres.

Mais peut-être plus que partout ailleurs, c’est certainement l’influence des diverses communautés, depuis les premiers conquérants jusqu’aux différentes vagues d’immigrations, qui va contribuer au façonnage de la ville.

Montréal est multiple, forte de son histoire humaine et sociale, son urbanisme et son architecture éclectique en sont certainement un témoignage !

Karine Medrala, architecte du patrimoine au Conseil général de l'Essonne.

La journée de vendredi : l'autre Montréal, service de la ville et maison Cartier

VISITE DE L'AUTRE MONTREAL...

Parc expo 67


Le port

Les anciens silos

Les "choses françaises" dans le bus

Cette journée a commencé par une visite en bus de Montréal avec Bernard Vallée, de l'association "l'autre Montréal". Il s'agit d'un collectif d'animation urbaine à vocation citoyenne qui propose de découvrir d'autres réalités à Montréal : des zones industrielles désafectées, des quartiers populaires dont Parc Extension à forte mixité ethnique (130 ethnies représentées) ou encore le parc de l'expo 67, évènement majeur pour l'ouverture du Québec sur le monde.

Cet après-midi, rendez-vous avec le bureau du patrimoine de la ville de Montréal avec Jean Laberge, architecte et ses collègues. Cela nous a permis de mieux cerner les différents niveaux de travail autour du patrimoine (gouvernemental, agglomération, ville et arrondissements) et la politique de valorisation et d'aide dans ce domaine. Une opération "patrimoine et architecture de Montréal" récompense chaque année les propriétaires dont la restauration d'habitations est exemplaire. Cette opération comprend également des activités gratuites (visites, conférences, etc) pour sensibiliser les montréalais.

CHANGEMENT DE DECOR !

Le salon, Maison Cartier

Notre dernière visite a eu lieu à la maison Cartier (Pas Jacques... Mais Georges-Etienne, avocat, homme d'affaires et politicien à l'origine de la confédération canadienne). Appartenant à Parcs Canada (organisme national de gestion des ressources culturelles), ce musée reconstitue l'intérieur d'une villa bourgeoise du XIXe siècle. Nous y avons rencontré des représentants de l'association québécoise d'interprétation du patrimoine.

Manger à Montréal par Mireille

Poutine (1), fèves au lard, carré de dattes, tarte aux pécanes, et avec ça vous prendrez quoi comme breuvage (2)? Au Québec, le panel des plats dans les restos est large : plats traditionnels locaux et plats offerts par une multitude d'établissements : libanais, italiens, mexicains, chinois, japonais, portugais, bretons, grecs, indiens, etc... Arrosés par une bouteille de vin qu'il est possible d'apporter.

Vous pourrez déguster des plats "pas plattes" (3) et aussi des soupes, des 1/2 sandwiches (ou entiers pour les plus affamés ! ) ou de grandes assiettes de pâtes aromatisées.

Et si vous prenez le train, vous pourrez manger à petit prix grâce au chariot ambulant mais vous ne ferez pas un repas gastronomique !

Bon appétit !

(1) poutine : frites au fromage

(2) breuvage : boisson

(3) pas plattes : bons

La journée de jeudi : écomusée du fier monde à Montréal et Beloeil

"VALORISER LE MONDE ORDINAIRE"

Aujourd'hui, rencontre avec René Binette, directeur de l'écomusée du fier monde. Cette structure valorise l'histoire industrielle et ouvrière du quartier centre-sud de Montréal, dans lequel elle est implantée, selon une démarche participative : collecte de témoignages et de photographies d'anciens ouvriers, contribution d'habitants à la réalisation et/ou médiation d'expositions etc.). Le musée se veut être un outil d'éducation populaire et de citoyenneté.
L'écomusée existe depuis 1980, mais est installé, depuis 1996, dans les anciens bains publics "Généreux", du nom du conseiller municipal de l'époque.

BEAU PIED BELOEIL!

Puis petit tour en banlieue, dans la commune de Beloeil (20000 habitants) pour une rencontre avec des représentants de la ville au centre culturel. Ici, la banlieue s'est développée autour des noyaux villageois, avec la construction de pavillons individuels (bois ou briques) dès 1930. L'historien local nous a présenté différents types d'habitations lors de la visite de la ville à bord du sympathique bus scolaire jaune québécois. Le site du centre culturel est un pôle regroupant toutes les activités culturelles de la ville : bibliothèque, théâtre, activités plastiques etc. L'accueil, fort chaleureux, s'est terminé autour d'une dégustation de produits locaux.

La journée de mercredi : Institut du patrimoine de l'UQAM et centre d'histoire de Montréal

De retour à Montréal, rencontre avec Joanne Burgess de l'Institut du patrimoine de l'Université de Québec à Montréal (UQAM). Cet institut réunit des chercheurs de différentes disciplines (histoire, muséologie, tourisme, communication...) autour de la question du patrimoine. Leurs recherches donnent lieu à des colloques et publications : "patrimoine et patrimonialisation du Québec et d'ailleurs", "la recherche en éducation muséale", "patrimoines : fabrique, usages et réemplois" etc.

Belle rencontre cet après-midi avec, J. F. Leclerc, directeur du Centre d'histoire de Montréal, centre d'interprétation municipal. Installé dans une ancienne caserne du vieux Montréal, ce centre présente une exposition permanente sur l'histoire de la ville à travers cinq périodes marquantes et des expositions temporaires à l'étage, notamment "Made in Montréal?". Des actions sont menées avec les habitants : "si loin, si proche...", où le centre va à la rencontre de différentes communautés montréalaises ou encore "clinique de mémoire", une collecte de témoignages dans la ville (le titre vient de l'expression "clinique de sang", le don du sang au Québec et parce que "le sang de l'histoire c'est la mémoire" comme le dit si bien M. Leclerc).

Marie-Claire et le traversier...

Le Saint-Laurent est incontournable quand on voyage de Montréal à Québec. Un peu frustrée de l'avoir vu de loin à Montréal (plus exactement depuis le Mont Royal), de l'avoir franchi sur le pont Cartier sans que l'on puisse vraiment s'arrêter pour en jauger sa dimension, je m'étais bien jurée d'aller voir le fleuve de plus près quand l'occasion se présenterait.
Cela s'est fait à Québec. Le site de promontoire de la vieille ville fait que la vue plonge directement sur le fleuve. Hélas, les énormes paquebots de croisière en gâchent un peu la perspective. Pour les habitants de Québec, il semble habituel de franchir le fleuve pour aller à Lévis, ville qui fait face à la capitale. Et ils y vont en petit ferry, le traversier comme on dit ici. Moyennant 5 dollars aller-retour, je me suis payée le trajet sur le traversier qui fait la navette toutes les 1/2 heures.
Double aubaine, il faisait très beau et le plus gros des paquebots était parti. Peu de touristes sur le traversier mais une classe de collégiens qui tournaient une video; tous avaient revêtus des t-shirts aux couleurs du Québec et agitaient des drapeaux. Comme je m'en étonnais, la professeure m'expliqua qu'ils participaient à l'opération "rêver votre ville". Initialement, ils devaient tourner leur video sur les terrasses du château Frontenac, symbole de la ville. Mais à cause des fouilles qui ont eu lieu pour mettre au jour les restes du château St-Louis, siège du gouverneur, les terrasses ne sont plus accessibles au public. La classe a donc décidé de se filmer sur le traversier car en arrière-plan, on a une vue imprenable sur le château Frontenac. Et les collégiens ont chanté et joué la comédie entre 11h et 13h en faisant les aller-retours Québec/Levis. Morceau de nationalisme québécois, il fallait les entendre chanter !
Du coup j'en ai un peu oublié le St-Laurent, les coteaux de Levis avec ses petites maisons et ses cloches, la vue panoramique sur la ville de Québec. Mais je vais me rattraper à Montréal où je compte bien retrouver le fleuve !

La journée de mardi : service de la ville, Matéria, MCCCF et centre d'interprétation de Place-Royale (QbC)

Ancienne manufacture, actuel siège de services de la ville de Québec.

Aujourd'hui, William Moss, archéologue et Marc-André Bluteau, historien du service de l'aménagement du territoire de la ville de Québec nous ont présenté la politique patrimoniale municipale. Leur service est installé dans une ancienne manufacture de chaussures et de corsets. Une exposition permanente retrace l'histoire ouvrière du lieu.
Après une présentation du nouveau territoire de la ville de Québec, créé en 2002 (communes environnantes devenant des arrondissements de la ville), M. Bluteau a dressé le portrait des quatre arrondissements historiques que sont Vieux Québec, Charlebourg, Sillery et Beauport. Le rôle de son service aujourd'hui est d'encadrer la recherche, de donner un avis à la commission d'urbanisme et de conservation de Québec, de sauvegarder des ensembles exceptionnels et de sensibiliser le public. Plusieurs défis sont à relever notamment la préservation de la vie de quartier, face à l'industrie touristique et la sauvegarde du patrimoine religieux en proie à d'importantes spéculations financières. Il a dressé une liste d'outils (législation, inventaire, guides d'intervention) pour mener à bien cette politique.
Ensuite, M. Moss, archéologue, a présenté un outil de sensibilisation à l'archéologie destiné aux animateurs. Il a donné des exemples de sites fouillés et de leur valorisation. Il a insisté sur les différences de législation entre la France et le Québec, notamment l'absence d'archéologie préventive.
Enfin, concernant les actions de diffusion au public, plusieurs moyens sont utilisés : panneaux dans la ville "Découvrir Québec", circuits sonores et virtuels, expositions virtuelles et publications. Les nouvelles technologies sont privilégiées. Un "réseautage" est mis en place via un portail numérique qui regroupe les sociétés d'histoires et les institutions muséales. Selon M. Bluteau : "La diffusion au patrimoine est faire en sorte que les citoyens connaissent et aiment le patrimoine de Québec, développent un sens d'appartenance fort et deviennent des agents actifs de conservation de leur patrimoine".

M. Moss et M. Bluteau du service de la ville de Québec

A midi, nous avons visité Matéria, centre d'exposition et de diffusion d'oeuvres contemporaines géré par un collectif d'artistes canadiens, unique à Québec. Nous y avons visité l'exposition "Le jeu du collectionneur" de Gilbert Poissant.

Centre Matéria

Déjeuner avec Mme Michaud, de la direction du patrimoine et de la muséologie du ministère de la culture, des communications et de la condition féminine (MCCCF) puis rencontre avec Mme Rompré et Mme Daignault au centre d'interprétation de Place-Royale, structure dépendant du Musée de la Civilisation. Historiquement, cette place est "le berceau de l'Amérique française" avec l'installation de l'habitation de Champlain mais également un haut lieu de commerce au XIXe siècle avec les anglais. Au programme : visite d'une exposition présentant les objets issus des fouilles de la Place Royale, puis visionnage d'un film en 3D intitulé "Champlain, retracé" qui a fait débat dans l'équipe... Une discussion sur les méthodes d'évaluation des publics a conclu cette journée.


Une vue de la Place Royale (ville basse, près du port) et de son centre d'interprétation.

Nous quittons Québec ce soir pour regagner Montréal par le train.

A demain